NOVEMBRE 2008.jm
Utilisation du SO² lors de la vinification
Plusieurs d’entre nous se posent régulièrement des questions concernant les doses de SO² à utiliser. Le résumé qui suit tente de clarifier les choses. Je me suis inspiré des ouvrages suivants pour le rédiger :
« Connaissance et travail du vin » Emile Peynaud Dunod 1984
« L’oenologie » Colette Navarre Lavoisier-Tech & Doc 1994
« Le Vin de l’analyse à l’élaboration » – Delanoe, Maillard, Maisondieu Tech & Doc 1987
Rôle du sulfitage dans le moût : Il a pour objet de
- Sélectionner le milieu fermentaire en agissant comme antiseptique. A doses croissantes, ce sont successivement les bactéries, puis, les levures apiculées et, enfin, les levures elliptiques qui disparaissent.
- Clarifier le moût en retardant, par son effet narcotique sur les levures, le départ en fermentation ; ceci permet un meilleur dépôt des bourbes.
- Retarder l’oxydation du moût en profitant de l’effet anti-oxydassique du SO², particulièrement utile en présence de raisins pourris qui contiennent de la laccase, mais aussi vis-à-vis de la tyrosinase contenue dans les raisins sains.
Rôle du sulfitage dans le vin : il assure la protection du vin
- Protection vis-à-vis des bactéries lactiques très sensibles au SO² libre mais aussi au SO² combiné ce qui permet de maintenir l’acidité volatile à un niveau bas.
- Protection vis-à-vis de l’oxydation : le SO² capte l’oxygène dissous dans le vin et s’oxyde en H²SO³ ce qui empêche le jaunissement et la madérisation. Ceci entraîne une légère acidification du vin.
- Amélioration gustative en permettant de conserver la fraîcheur des arômes variétaux.
- Légère amélioration de l’intensité de la coloration.
Formes prises par le SO². Une fois introduit dans le moût ou dans le vin, le SO² se présente sous deux formes principales : l’une combinée à différents constituants du vin, la seconde à l’état libre. L’inconvénient majeur du SO², utilisé comme produit conservateur, est lié à sa réactivité chimique qui en rend la plus grande partie inactive.
- SO² combiné : cette forme représente environ les deux tiers du SO² introduit. Une partie (environ la moitié) est combinée de façon stable, c.-à-d. définitive. L’autre moitié est combinée de manière instable c.-à-d. qu’en raison d’une réaction chimique d’équilibre, elle peut revenir à l’état libre : il s’agit d’une sorte de réserve qui vient alimenter la fraction SO² libre au fur et à mesure qu’elle s’abaisse par oxydation. On dit aussi qu’il s’agit d’une combinaison à forte constante de dissociation.
- SO² libre : c’est cette partie que nous mesurons dans le vin au moyen du réactif iodé. C’est également cette partie qui permet d’assurer la protection du vin. Une petite fraction de ce SO² libre est appelée SO² actif et sa proportion est essentiellement déterminée par l’acidité réelle du vin, c.-à-d. son PH. Par exemple, à PH = 2,8 elle représente environ 10 % du SO² libre alors qu’à PH = 3,6 elle ne représente plus que 2,5 %. Le reste sert de réserve et ne devient actif qu’au fur et à mesure des besoins.
- SO² total : c’est, bien entendu, la somme SO² combiné + SO² libre. La législation limite l’utilisation du SO² total à 160 mg/litre pour les vins rouge, 210 mg/litre pour les blancs et rosés secs, 260 mg/litre pour les vins doux
Doses à utiliser : elles sont données à titre indicatif et représentent les quantités généralement utilisées en vinification conventionnelle. En vinification « biologique », elles sont inférieures.
– dans le moût : elles sont, ici, exprimées en SO² total et pour des vendanges à PH compris entre 3,2 et 3,3.
3 gr/hl de vendange saine et froide pour vinification en rouge.
5 gr/hl de vendange à l’état sanitaire moyen pour vinification en rouge.
6 à 8 gr/hl de vendange altérée (pourriture) pour vinification en rouge.
3 gr/hl de moût, après pressurage de raisins sains, pour vinification en blanc ou rosé sec
5 gr/hl de moût, après pressurage de raisins altérés, pour vinification en blanc ou rosé sec
NB : Pour des vendanges très peu acides (PH plus élevé), les doses doivent être augmentées et vice-versa.
– dans le vin, durant l’élevage : elles sont, ici, exprimées en SO² libre à maintenir dans le vin
15 à 25 mg/litre de vin rouge
20 à 30 mg/litre de vin blanc ou rosé sec 60 à 80 mg/litre de vin moelleux
– dans le vin à l’embouteillage : elles sont également exprimées en SO² libre à maintenir
10 à 15 mg/litre de vin rouge
15 à 20 mg/litre de vin blanc ou rosé sec
40 à 50 mg/litre de vin moelleux
Remarques très importantes :
- Le métabisulfite de potassium utilisé par la majorité d’entre nous ne contient que 50 % de SO² total.
- Selon Peynaud, « lorsqu’on ajoute du SO² à un vin qui en contient, seuls les deux tiers de la dose ajoutée restent à l’état libre et le reste se combine ».
- Lorsque la fermentation malolactique n’est pas souhaitée, on soutire le vin dès la fin de la fermentation alcoolique et on sulfite à 6 ou 8 gr/hl de SO² total, en le refroidissant en-dessous de 18°c, de sorte que la teneur en SO² libre soit de l’ordre de 30 à 40 mg/litre ce qui est normalement suffisant pour interdire le départ de la malo en bouteille.
Exemple pratique : Après titrage à l’iode, je constate que mon vin ne contient plus que 16 mg/l de SO² libre. Je voudrais sulfiter ma tourie de 54 litres, avec du métabisulfite de potassium, pour amener la teneur du vin à 40 mg de SO² libre par litre et ainsi éviter qu’il ne fasse sa malo en bouteille. Il lui manque : 40 16 = 24 mg de SO² libre/litre.
Comme seuls 2/3 du SO² total que je vais ajouter resteront à l’état de SO² libre, je dois lui ajouter 24 x 3/2 = 36 mg de SO² par litre. (24 mg représentent bien les 2/3 de la dose à ajouter)
Comme le métabisulfite de potassium ne contient que 50 % de SO², je dois encore multiplier le résultat par 2, soit 36 x 2 = 72 mg de métabisulfite par litre de vin.
Au final, pour amener les 54 litres de la tourie à 40 mg de SO² libre par litre, je dois y ajouter 72 x 54 = 3888 mg soit 3,9 gr de métabisulfite.