Le choix d’un porte-greffe

LE CHOIX DU PORTE-GREFFE
Après avoir choisi un cépage, il faut lui associer un porte-greffe. Il s’agit d’un choix important car il va conditionner la valeur du vignoble et souvent sa longévité. Il n’existe pas de porte-greffe « passepartout »
valable pour toute une région donnée ni même pour une commune. La raison en est la diversité des origines géologiques des sols, la diversité de la topographie et, bien entendu, la diversité des cépages utilisés.
Quelques règles de base résumées ci-après détermineront le choix du porte-greffe :

– Plus le cycle est court, plus le porte-greffe doit être faible.
– Les porte-greffes où prédomine le RIPARIA favorisent la maturation.
– Les porte-greffes où prédomine RUPESTRIS favorisent la vigueur.
– Les porte-greffes où prédomine BERLANDIERI favorisent la maturation et tolèrent un sol calcaire.

QUELS SONT LES CRITERES DE CHOIX ?

  • LA RESISTANCE AU PHYLLOXERA : Bien que d’aucuns prétendent que notre sol mosan ait été épargné lors de la catastrophe phylloxérique, rien ne prouve cette affirmation et, quand bien même elle serait exacte, rien ne garantit que cette immunité perdurerait. Au contraire, plus le nombre de vignerons ira croissant, et plus les risques augmenteront de voir cet insecte s’installer chez nous ! Il vaut donc mieux être prudent et se prémunir en choisissant des pieds soudés greffés sur porte-greffe résistant au phylloxéra. Les variétés de vigne les plus résistantes sont d’origine américaine et ont pour noms RIPARIA, RUPESTRIS et BERLANDIERI.
    Des combinaisons entre ces souches donnent des porte-greffe parmi lesquels les plus résistants sont : FERCAL, C3309, 161-49C, 5BB, R110, SO4, EM333, 420A, RUPESTRIS DU LOT, et 41B. Par contre, il faut absolument éviter : VIALLA, 196-17, 4010Cl et 1613C.
  • LA RESISTANCE AU CALCAIRE : Beaucoup de sous-sols de la vallée mosane sont constitués de calcaire : les exploitations de carrières à Engis, Amay, Ampsin, Moha, Seilles etc… en témoignent. Dans les sols où il y a surabondance de calcaire et de ses dérivés, on constate, la plupart du temps, une carence en fer. Cette carence entraîne une maladie physiologique de la vigne appelée CHLOROSE. Paradoxalement, c’est aussi dans ces terres calcaires que la vigne donne les vins les plus fins. Les calcaires les plus actifs sont ceux qui se présentent dans le sol sous forme pulvérulente et qui ont donc les particules les plus fines : les terres d’alluvions calcaires seront donc les plus nocives. Avant de choisir un porte-greffe, il est donc indispensable de prélever un échantillon de terre, d’y faire mesurer la teneur en calcaire actif, et de soumettre le résultat à un pépiniériste.
    Les porte-greffes les plus résistants au calcaire sont : FERCAL, EM333, 161-49C, 41B, RU140, 5BB, 420A, SO4, R110 et R99. Ceux qu’il faut absolument proscrire sont : RIPARIA GLOIRE, RUPESTRIS DU LOT, 125AA, C3309 et VIALLA.
  • LA RESISTANCE A LA SECHERESSE : A première vue, on pourrait croire que, sous notre climat pluvieux, il n’y a pas de problème de sécheresse. Toutefois, sur certains coteaux très pentus, où la couche de terre est peu épaisse et le sous-sol constitué de roche, l’eau peut être rapidement entraînée vers le bas de la pente. Dans ces conditions, les meilleurs porte-greffes sont issus des combinaisons entre BERLANDIERI et RUPESTRIS. Ce sont : R110, RU140, 1447P, R99, P1103, 41B et EM333.
  • LA RESISTANCE A L’HUMIDITÉ : Peu de porte-greffe se complaisent dans les terres très humides et, lorsque c’est le cas, il vaut mieux pratiquer un bon drainage du sol. De tous les porte-greffes, seuls RIPARIA et ses descendants semblent convenir « le moins mal ».
  • LA RESISTANCE AUX NEMATODES : Les nématodes sont des vers minuscules qui vivent en parasites sur les racines de la vigne. Certains sont responsables de la transmission des viroses de la vigne. Comme il n’existe pas de remèdes pour combattre ces viroses, il y a lieu de choisir les porte-greffes les plus résistants : SO4, 5BB, R99, 8B, 4010Cl et 99R. Par contre, les plus sensibles sont : 41B, 161-49C, C3309 et 161-49.
  • LA VIGUEUR DU PORTE-GREFFE : Le choix d’un porte-greffe faible est d’autant plus nécessaire que le cycle du cépage sera court, que le rendement à obtenir sera faible et que la situation géographique du vignoble sera septentrionale. C’est bien le cas chez nous, où des porte-greffes trop vigoureux entraîneraient un débourrement trop précoce et donc des risques plus importants d’exposition aux gelées du printemps, produiraient trop de bois avec des risques de coulure et, suite à des productions trop importantes retarderaient la maturité. On peut ranger les porte-greffes en trois catégories :
    – FAIBLES : RIPARIA, 101-14, 420A, 161-49C et SO4
    – MOYENS : 3309, 5BB, 41B.
    – PUISSANTS : RUPESTRIS DU LOT, R99, R110, RU140, P1103
  • LE CYCLE VEGETATIF : Le greffage n’affecte en rien le rythme de végétation du greffon et du porte-greffe. Il y a intérêt à choisir les combinaisons où les deux parties de l’assemblage ont des rythmes identiques. C’est ainsi que dans nos régions, comme nous recherchons un débourrement tardif et une maturité précoce, nous devons associer aux cépages qui remplissent ces conditions des porte-greffes à cycle végétatif court comme : RIPARIA, 41B, 101-14, SO4
  • LA COMPATIBILITE : Tout comme les greffons, les porte-greffes comportent diverses sélections clonales dont certains sujets présentent des incompatibilités nettement marquées avec certains clones de greffons. Vu le choix relativement limité des combinaisons porte-greffe/greffon dans nos régions, il semble qu’aucune incompatibilité manifeste n’ait été mise en évidence jusqu’à présent.
  • LES TENDANCES POUR LE FUTUR : Les spécialistes prévoient que les six porte-greffes les plus cultivés à partir de l’an 2000 seront dans l’ordre : SO4, R110, 41B, 5BB, P1103 et RU140. Quoi qu’il en soit, le choix d’un porte-greffe est souvent le résultat d’un compromis difficile qu’il vaut mieux confier à un pépiniériste expérimenté.

LES PORTE-GREFFE LES PLUS UTILISES EN VALLEE MOSANE

RIPARIA GLOIRE : s’enracine aisément mais craint l’excès de calcaire. Il est utilisé en sol argileux, marneux et schisteux. Sa faible vigueur permet aux cépages à cycle court d’arriver à bonne maturité. On l’utilise en Alsace dans les terrains peu chlorosants.
41B : Obtenu par MILLARDET en hybridant le CHASSELAS et le BERLANDIERI. Il se comporte parfaitement en sol calcaire, raison pour laquelle il domine en Champagne. Il est aussi utilisé en Bourgogne. Sa vigueur étant moyenne, il ralentit quelque peu le débourrement.
SO4 : Issu du BERLANDIERI et du RIPARIA, il est très utilisé en France, en Allemagne et en Autriche dans les sols calcaires. Il réunit pratiquement toutes les conditions pour donner satisfaction chez nous même si, dans des sols riches, il pourrait conférer trop de vigueur.
101-14 : Issu de RIPARIA et de RUPESTRIS, il se complait dans les sols silico-argileux humides. Il est souvent utilisé sur des variétés à maturité rapide.
KOBER 5BB : Issu de BERLANDIERI et de RIPARIA, il est utilisé en Champagne, Allemagne, Suisse et Autriche. En Alsace, on l’utilise régulièrement sur le RIESLING. Il convient davantage pour les cépages de deuxième époque en sols légèrement humides et moyennement calcaires. Il s’adapte partout, excepté dans les terres trop riches.

Jules MARQUET

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